(1877 Paris- Meudon 1957)
Les jardins de la Villa d’Este
Huile sur toile
55 x 75 cm
Signé et daté en bas à droite : GEORGES LEROUX 1908
Exposition : probablement Exposition Georges Leroux, Galerie Devambez, 1913, n° 38 » du catalogue « Les Cyprès de la Villa d’Este »
C’est à la suite de son Prix de Rome de 1906, obtenu pour La famille dans l’Antiquité, conservée à l’École Nationale des Beaux-Arts de Paris, que Leroux effectua son premier séjour romain en qualité de pensionnaire, de 1907 à 1909. Ébloui par la lumière de l’Italie, le jeune parisien effectua tout au long de sa vie de nombreux voyages dans ce pays, qui le conduisirent de la Vénétie à la Toscane et de l’Ombrie jusqu’à Naples. De nombreuses toiles représentant des paysages italiens furent envoyées par Leroux en 1913 à la célèbre galerie Devambez, au 43 du boulevard Malesherbes, pour qu’elles y soient exposées. D’ailleurs, notre toile y fut probablement présentée – figurant au n°38 du catalogue – du 8 au 22 janvier 1913.
Cette véritable institution, implantée au cœur du Paris élégant du début du XXe siècle, d’abord spécialisée dans le domaine de la gravure, exposa par la suite des artistes d’une modernité classique comme Leroux, mais aussi des maîtres de l’Avant-garde comme Picasso, Matisse ou de Chirico. Le journaliste et critique Henry Bérenger évoquait les 70 œuvres réunies par Leroux, des vues de l’Italie et de la Sicile, comme celles de « l’un des meilleurs élèves de l’école de Rome ». La galerie Nationale d’Art Moderne de Rome présente notamment la très grande Promenade du Pincio.
Cette reconnaissance officielle fut consacrée par de nombreuses commandes et achats de l’Etat, une participation à l’Exposition Universelle de Paris, en 1937, et une longue carrière à l’Institut. Cependant, il est important de souligner que le peintre et son œuvre se trouvèrent terriblement bouleversés après la participation de celui-ci à la Première Guerre Mondiale, faisant de ces paysages à la lumière onirique les témoins de la première partie de sa vie, encore baignée d’insouciance.
Notre toile dévoile les couleurs chaudes et lumineuses typiques du peintre, évoluant autour du contraste créé par ses verts azurés et ses roses orangés. La composition s’ouvre sur une vaste étendue, observée depuis un point de vue culminant au sommet d’un promontoire. Au premier plan, servant de repoussoir, un muret écru, rosé par le soleil de fin d’après-midi, s’étend de chaque côté et s’ouvre sur une balustrade en avant, permettant de descendre par un escalier à gauche et à droite vers le magnifique jardin qui orne le côteau du relief. De cette étendue verdoyante émergent quelques pins parasols sur la gauche, tandis que de majestueux cyprès s’élèvent et fournissent avec abondance le reste du terrain.
Les deux plus grands conifères, à droite de la composition, autorisent à situer la scène peinte par Leroux à la Villa d’Este, dans la ville de Tivoli, non loin de Rome. En effet, ce remarquable palais, bâti par le cardinal Hippolyte d’Este au milieu du XVIe siècle, a la particularité de dominer des jardins édifiés tout en longueur afin de mettre en avant la grandeur de la demeure, dont l’entrée est située à l’extrémité de l’axe médian délimité par de somptueux cyprès.
Si l’artiste peignit de nombreuses fois la Villa d’Este, ses jardins et son bassin, le point de vue que le peintre adopta pour notre toile est assez inédit puisqu’il décida, pour une fois, de ne pas mettre en avant le monument de la Renaissance italienne, mais bien la vaste vue panoramique qu’il offre depuis les balcons de sa façade.
Sur notre toile, Leroux privilégie davantage l’atmosphère et la vue imprenable, plaçant le spectateur dans la peau du peintre, voire d’un descendant de la noble maison d’Este, à qui le somptueux palais appartenait encore à la veille de la Première Guerre Mondiale, avant de devenir propriété nationale à l’issue de celle-ci. L’ambiance et la matière bourdonnantes qui se diffusent à travers la lumière de cette toile constituent un vibrant souvenir de ce temps rêvé, à l’aube du XXe siècle.