(actif à Naples de 1755 à 1788)
Un incendie dans la baie de Naples
Huile sur toile
105 x 155 cm / encadré : 123 x 175 cm
Cadre d’époque Louis XVI estampillé Infroit
Provenance : collection particulière, Italie
La découverte de documents d’archives nous permettra peut-être un jour d’éclairer avec plus de précision la formation et le parcours de l’une des figures les plus originales de l’art du paysage à Naples, dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.
C’est à un article fondateur de Constable, le grand spécialiste de Canaletto, paru en 1959, que l’on doit sa redécouverte.
Probablement d’origine romaine, Bonavia fut formé à l’école des grands paysagistes-décorateurs italiens qui, de Salvator Rosa (1615-1673) à Leonardo Coccorante (1680-1750), donnèrent une représentation expressive et théâtrale de la Nature.
Bonavia fut sans doute profondément influencé par les œuvres de Joseph Vernet, le grand peintre de marines français, qui séjourna à Naples de 1737 à 1746. On retrouve chez les deux artistes la même palette de tons clairs et suaves, la même approche atmosphérique du paysage, même si chez Vernet la touche est plus précise et que chez Bonavia celle-ci est large et faite de coups de brosse rapidement posés, donnant un aspect « moussu » à ses œuvres, reconnaissable entre mille.
De prestigieux commanditaires, voyageurs du Grand Tour, aristocrates italiens ou diplomates auprès de la cour de Naples constituaient sa clientèle, comme John Montagu, Lord Brudenell, qui commanda son portrait à Mengs et Batoni, ou l’ambassadeur d’Autriche, le comte Karl Josef von Firmian.
Les scènes nocturnes, éclairées par une éruption du Vésuve ou les flammes d’un incendie, constituaient souvent l’une des pièces maîtresses que les voyageurs ramenaient de leur périple italien (comme en témoignent aujourd’hui encore les collections de Stourhead ou de Basildon Park, restées intactes depuis le XVIIIe siècle). Des artistes comme Pierre-Jacques Volaire (1729-1799) ou Joseph Wright of Derby (1734-1797) s’en firent même une spécialité, multipliant ces épisodes spectaculaires et dramatiques qui illustraient la théorie pré-romantique du Sublime, formulée par le philosophe anglais Burke (1729-1797). Cette Nature grandiose et parfois destructrice permettait d’émouvoir le public par la « peur délicieuse » éprouvée devant la toile.
Pour faire naître un effet décoratif de l’opposition des sujets, ces scènes étaient souvent en paire avec des couchers de soleil, où était représentée une Nature idyllique.
Sur notre toile, pour construire sa composition, Bonavia a utilisé le contraste entre le brasier illuminant une forteresse rappelant le Castel dell’ovo, dans la baie de Naples, et la lune éclairant les flots et le port de la ville dominé par son phare.
Cette opposition nettement tranchée entre tons froids et argentés et teintes chaudes et rougeoyantes produit un effet des plus heureux, relevé par les nombreux détails et personnages qui viennent accrocher la lumière.
La fuite éperdue des innombrables petites figures devant l’incendie est peut-être une lointaine évocation de l’éruption qui détruisit en 79 de notre ère la ville de Pompéi, le « mythe fondateur » du Grand Tour ?
Nous remercions Monsieur Nicolas Spinosa qui a confirmé l’attribution de notre tableau à Bonavia.