(Milan ?, vers 1587 – Milan ?, après 1635)
Mariage mystique de sainte Catherine d’Alexandrie, avec sainte Agathe et saint Jean-Baptiste
Huile sur toile
170 x 196 cm
Provenance : Famille Costa de Beauregard, château de La Motte, La Motte Servolex (Savoie) ; collection Costa de Beauregard, Paris.
Bibliographie : Giuseppe Vermiglio. Un peintre caravagesque entre Rome et la Lombardie, catalogue d’exposition, Galleria Civica di Campione d’Italia, éditée par D. Pescarmona, Milan, 2000.
Réapparu sur le marché de l’art en 2021 et certainement réalisé pour une commande religieuse, comme le suggère sa grande dimension, la toile représente, le Mariage mystique de sainte Catherine d’Alexandrie : la célèbre vision eue en songe par la vierge martyre. L’Enfant, assis sur le genou de sa mère, s’apprête à mettre l’alliance au doigt de la sainte agenouillée devant lui, représentée avec la couronne et les bijoux rappelant ses origines nobles, tandis qu’on peut apercevoir à ses pieds la roue dentée, symbole du martyre dont elle a miraculeusement échappé.
L’iconographie traditionnelle est enrichie par la présence de saint Jean-Baptiste, avec son agneau devant lui, et de sainte Agathe, reconnaissable aux deux seins qu’elle nous présente sur un plat d’étain, et à la palme de son martyre.
L’ajout à la scène du Mariage mystique d’autres saints sans rapport direct avec cet épisode se retrouve dans de nombreuses œuvres dès le XVIe siècle. Sainte Agathe et saint Jean-Baptiste sont ici placés symétriquement de part et d’autre de la Vierge, selon un schéma qui rappelle celui des Conversations sacrées avec la Vierge intronisée et entourée de saints. L’idée de placer la Vierge parfaitement au centre du tableau, sur une petite élévation rocheuse accentue son importance par rapport aux autres figures. Inédit, ce tableau est l’une des plus belles œuvres de maturité de Giuseppe Vermiglio, artiste probablement d’origine milanaise, formé à Rome au début du XVIIe siècle, et dont la personnalité a été redécouverte et étudiée à la fin du siècle dernier.
Né vers 1587, Vermiglio dut s’installer très tôt à Rome, où il est mentionné dans des documents dès 1604. Sa vie mouvementée, entre bagarres et fréquents problèmes avec la justice, ressemble singulièrement à celle du Caravage, dont Vermiglio fut, sans surprise, l’un des plus fidèles suiveurs. De retour à Milan en 1620, le peintre obtint immédiatement un grand succès, avec en particulier de nombreuses commandes religieuses pour les différents édifices de la région, alors dirigés par le cardinal Feredico Borromeo. C’est précisément dans cette conjoncture, peu après son retour chez lui, que notre toile doit être datée. En observant notre Mariage mystique de sainte Catherine, les racines caravagesques de l’art de Vermiglio sont évidentes, non seulement dans la physionomie de saint Jean-Baptiste et dans le magnifique détail de l’agneau, rendu avec une précision naturaliste, mais aussi dans le clair-obscur baignant notre scène, dans laquelle les personnages se détachent fortement sur le fond sombre.
A côté de ces rapprochements, il faut souligner que les éléments caravagesques de notre toile s’intègrent dans un registre stylistique nouveau. Tout d’abord la structure rigoureuse de la composition confère à cette œuvre un caractère néo-Renaissance, amplifié par l’attitude solennelle et maîtrisée des personnages. Ce sont ces choix stylistiques qui distinguent toute l’activité lombarde de l’artiste, marquée par l’adhésion de l’artiste à la Contre-Réforme promue par Borromeo, afin de garantir aux œuvres sacrées une clarté exemplaire sur le plan iconographique et un registre expressif marqué par le décor et l’idéalisation. Parfait interprète de ce « retour à l’ordre », Vermiglio en propose une image élégante et cultivée, dans laquelle les références à l’art milanais de la première moitié du XVIe siècle, de Bernardino Luini à Gaudenzio Ferrari, se mêlent à une influence du classicisme bolonais, notamment de son chef de file, Guido Reni, dont Vermiglio connaissait les œuvres romaines, et d’Alessandro Tiarini.
Indépendamment de ses multiples influences, ce qui frappe le plus dans les œuvres de Vermiglio après son retour de Rome est la préciosité de son traitement pictural, qui alterne habilement des passages d’un réalisme surprenant avec des détails rendus par une touche lâche, toute en empâtements, et un grand raffinement des couleurs. Preuve en est, dans le Mariage mystique de sainte Catherine, le contraste entre l’exécution libre de la transparence du manteau de sainte Agathe et la description méticuleuse de la robe et du manteau de sainte Catherine, dont les motifs ornementaux en broderie sont particulièrement recherchés.