(1823-1906)
Le Jour de fête
Huile sur panneau parqueté
75 x 52 cm
1878
Signé en bas à droite : Alfred Stevens
Provenance :
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Collection de Charles Wilfrid de Bériot (1833-1914), Paris ;
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Vente de sa collection, Paris, hôtel Drouot (Chevallier), 11 mars 1901, no. 77 (7 000 francs)
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Vente de sa collection, Paris, hôtel Drouot (Lair-Dubreuil), 18 mai 1911, no. 33 (9 100 franc) ;
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Collection M. Zinjé, Bruxelles ;
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Vente de la collection de M. M. Zinjé, Bruxelles, Galerie Giroux, 1er février 1926, no. 176 (acquis par Stokvis 32 000 francs) ;
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Collection Stokvis, Bruxelles en 1936 ;
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Vente en partie d’une célèbre collection anversoise, Bruxelles, Galerie Georges Giroux (De Cohen), 19 mars 1949, no. 79 ;
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Collection du Baron Gaston Braun (1903-1990) et de Isabelle Flore Goethals (1902-1995) son épouse, château de Runenborg, Heusden ;
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Puis par descendance ;
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Collection privée, Belgique
Après avoir étudié la peinture à Bruxelles chez François Joseph Navez (1787-1869), Alfred Stevens entre en 1844 à l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Paris dans l’atelier de Jean-Auguste Dominique Ingres (1780-1867). Ami des impressionnistes Édouard Manet (1832-1883) et Berthe Morisot (1841-1895), il est introduit dans les milieux artistiques mondains grâce peut-être à l’activité de ses frères, le marchand d’art Arthur Stevens (1825-1890), installé à Paris et à Bruxelles, et le peintre animalier Joseph Stevens (1819-1892). Ses premières œuvres sont des scènes de genre sociales, mais c’est avec sa représentation de la femme de son époque, élégante et raffinée, dans l’intimité d’un intérieur luxueux que le peintre rencontre le succès. Ces deux aspects différents d’une réalité contemporaine révèlent le véritable leitmotiv de l’artiste Etre de son temps. Ses compositions qui se caractérisent par la vérité des attitudes et des physionomies, sont servies non seulement par la rigueur du dessin mais surtout par l’éclat et l’harmonie des couleurs. Elles séduisent un large public, et lui valent au Salon de 1861 de nombreux honneurs. Au Salon de 1867, il expose dix-huit œuvres, et obtient de fait une médaille d’or ainsi que le grade d’officier de la Légion d’honneur.
Notre tableau tire son sujet du thème de la lettre qu’affectionne Alfred Stevens. Chapeautée et gantée comme au retour d’une promenade, élégamment vêtue d’une robe de velours vert sombre qu’illumine un plissé blanc, une jeune femme s’est assise au milieu des fleurs qui lui ont été envoyées, et fixe le spectateur. Ce n’est pas sans humour, perceptible dans le titre choisi pour notre tableau Le Jour de fête, que l’artiste évoque la complexité des sentiments et l’idée d’une jeune femme gâtée de fleurs, le regard rêveur ou mélancolique à la lecture d’un mot d’amour qu’elle tient encore dans sa main. L’enveloppe à terre témoigne de sa précipitation à l’ouvrir.
Dans cette composition, le peintre ne représente pas son modèle dans un intérieur richement décoré comme il en a l’habitude. Fidèle à sa réputation de coloriste, il joue avec audace et vivacité de touche des tons roses nacrés des œillets, des roses et des rhododendrons, véritables échos à la carnation de son modèle qu’il met en valeur par le contraste des tons sombres de la draperie au fond et du velours vert de la robe.
D’après un courrier envoyé en janvier 1893 par Stevens à Charles Wilfrid de Bériot, propriétaire de l’œuvre, l’artiste considère Le Jour de fête peint « en 1878, comme une de ses meilleures œuvres ». Éminent compositeur et pianiste, Charles Wilfrid de Bériot est le fils unique du fameux compositeur et violoniste belge Charles Auguste de Bériot (1802-1870) et de l’une des plus célèbres chanteuses de l’histoire de l’opéra, Maria Felicia Malibran (1808-1836) née Garcia.
Parallèlement à sa carrière de pianiste virtuose et de professeur au Conservatoire de Paris, Charles de Bériot collectionne passionnément les œuvres des peintres paysagistes contemporains dont il gagne l’amitié. Débutant sa collection avec des tableaux hollandais du XVIIe siècle comme Rembrandt (1607-1669) et Gerard Terburgh (1617-1681), il se concentre par la suite sur le travail des grands maîtres du paysage du XIXème siècle, précurseurs de l’impressionnisme, dont il est un des premiers admirateurs. Ainsi ses deux ventes de 1901 et de 1911 comptent les plus beaux tableaux d’Eugène Boudin (1824-1898), mais aussi de Claude Monet (1840-1926), Gustave Courbet (1819-1877), Johann-Barthold Jongkind (1819-1891) et Henri Harpignies (1819-1916).
Hommage à la modernité d’Alfred Stevens, Le Jour de fête fait figure d’exception dans la collection de Charles de Bériot qui le prête accompagné de La Confidence à l’Exposition de l’œuvre d’Alfred Stevens, organisée en 1900 à Paris.