DIT JAMES BERTRAND
(Lyon 1823 – Orsay 1887)
Lesbie et le moineau
Huile sur toile
110 x 65 cm
Signé et daté, en bas à gauche : JAMES BERTRAND.1875.
PROVENANCE : Ecosse, collection particulière.
EXPOSITION : Salon de 1875, n°185
C’est au sortir d’une enfance lyonnaise que Jean-Baptiste Bertrand rejoint l’atelier de Claude Bonnefond. Celui-ci, un ancien élève du peintre troubadour Pierre Révoil, lui succède comme directeur de l’École des Beaux-Arts de la ville en 1830.
C’est donc auprès de Bonnefond, maître exigeant, tenant d’une ligne classique, ayant parcouru l’Italie et fréquenté Schnetz, Horace Vernet et les nazaréens allemands que Bertrand apprend les rudiments de son art.
Revenu de Rome, il commence à exposer au Salon en 1857 (il y présente une Idylle), puis multiplie les participations, tout d’abord avec des toiles évoquant le pittoresque de l’Italie, puis, à partir du milieu des années 1860, des œuvres érudites ayant pour sujets l’histoire antique ou la littérature (comme l’Ophélie, fig.1 du Salon de 1871).A Phryné aux fêtes d’Eleusis en 1866, succède La mort de Sapho en 1868. C’est à cette veine raffinée, semée de références archéologiques, qu’appartient la Lesbie. Exposée au Salon de 1875, la toile connaît un certain succès critique . elle est gravée par Goupil et sert de modèle à la peintre sur porcelaine Hortense Richard pour l’une de ses grandes plaques.
Le sujet de notre toile est à la fois un éloge de l’animal favori et une déploration sur sa mort, thème courant dans l’antiquité. Il peut aussi revêtir une signification érotique et la mort du moineau, animal dont la voix mélodieuse lui conférait une réputation de sensualité, symboliser celle d’un amour passionné.
Lesbie était la maîtresse du poète Catulle (87-54 av. J.C.) à laquelle il dédia de nombreux poèmes (la moitié des 118 qui nous sont parvenus). Épouse d’un consul, elle était célèbre pour la liberté de ses mœurs et a inspiré les artistes de son temps. Son surnom de Lesbie lui aurait été donné par Catulle en référence à la poétesse grecque Sapho qui vivait sur l’île de Lesbos. Elle y tenait une école pour femmes où étaient enseignés l’érotisme et la poésie.
Le choix des couleurs particulièrement raffiné de notre toile évoque, pour le fond, les fresques pompéiennes et les vases grecs à figures noires. La figure de Lesbie se découpe avec grâce dans sa robe blanche aux savants effets de drapés. Le guéridon antique sur lequel repose l’oiseau est directement inspiré de ceux trouvés lors des fouilles menées sur les sites de Pompéi et d’Herculanum depuis le milieu du XVIIIe siècle.
Cette mode pour une vision archéologique de l’antiquité trouva en France de spectaculaires expressions comme la maison pompéienne du prince Jérôme Napoléon avenue Montaigne, à Paris ou la villa Kérylos à Beaulieu.D’autres artistes comme Alma-Tadema ou le sculpteur Truphème illustrèrent le thème de Lesbie dans les années 1865-75.