(1758 Cluny – Paris 1832)
La Toilette
Huile sur toile
32,5 x 24 cm
PROVENANCE : Collection Abel Vautier; collection Grille; collection Guibert (acheté au précédent 1100 francs en 1830); collection Feuardent; collection André Lazard
EXPOSITION : Exposition, Caen, 1861, n°4; Exposition des œuvres de Prud’hon au profit de sa fille, Ecole des Beaux-Arts, Paris 4 mai-4 juillet 1874, n°96; Deuxième exposition des portraits du siècle, Ecole des Beaux-Arts, Paris, 1885, n°251; Exposition des portraits de femmes et d’enfants, Ecole des Beaux-Arts, Paris, le 30 avril 1897, n°166; Prud’hon, Palais des Beaux-Arts (Petit Palais), Paris, mai-juin 1922, n°69
BIBLIOGRAPHIE : Charles Blanc, Histoire des peintres français au dix-neuvième siècle, tome I, 1845, Prud’hon, pp.217-270, n°20; Edmond Goncourt, Catalogue raisonné de l’œuvre peint dessiné et gravé de Pierre-Paul Prud’hon, Paris, 1876, pp.130-131, n°54; Jean Guiffrey, L’œuvre de Pierre Paul Prud’hon, Paris, 1924, p.286, n°774; Prud’hon ou le rêve du bonheur, Paris, Grand Palais, 1997-98, mentionné p.182.
Prud’hon débute sa carrière à l’Académie de Dijon, alors dirigée par Devosge, puis part pour celle de Paris, où il passe quatre années. En 1784, il revient à Dijon pour le concours des Etats de Bourgogne, qu’il remporte. Il gagne alors l’Italie, où il étudie les maîtres anciens et découvre l’art du Corrège, qui le marqua à un point tel qu’on le surnomma le “Corrège français”. En 1798, monsieur de Lannoy lui commande la décoration de l’Hôtel St Julien, qui fut tellement admirée qu’elle lui attira la jalousie de certains confrères.
Prud’hon connaît sous l’Empire la période la plus faste de sa carrière. La Paix, ou le Triomphe de Bonaparte, Premier Consul (Chantilly, musée Condé) grand dessin allégorique qu’il expose au salon de 1801, fut l’une des premières œuvres qu’il réalisa à la gloire de Napoléon. Il reçoit ensuite de nombreuses commandes officielles, dont le célèbre Portrait en pied de l’Impératrice Joséphine (1805, musée du Louvre). En 1808, Napoléon remet à Prud’hon la croix de la Légion d’honneur pour La Justice et la Vengeance divine poursuivant le Crime (musée du Louvre). Grâce à l’appui de son ami, le comte Frochot, préfet de la Seine, Prud’hon est nommé décorateur officiel de l’immense fête donnée le 10 juin 1810, en l’honneur des noces de Napoléon Ier et de Marie-Louise, célébrées le 1er avril 1810.
Notre petit tableau, lithographié par Maurin sous le titre La toilette pourrait être l’esquisse du portrait en pied de madame B…, présenté par Constance Mayer au salon de 1806, sous le numéro 376 (peut-être s’agit-il de madame de Beaulieu, une amie de l’artiste?). Présenté comme un autoportrait de Constance Mayer lors de son passage dans la vente Lelong (Paris, galerie Georges Petit, 11-15 mai 1903, n°537), cette huile sur toile d’assez grandes dimensions (81 x 64 cm) semble d’un faire “un peu sec » comme le souligne Sylvain Laveissière.
Plusieurs dessins de la main de Prud’hon sont préparatoires à ce tableau exécuté par celle qui fut à la fois son élève, sa muse et sa maîtresse : une étude au pastel pour le visage du modèle (Louvre, Inv. 32586), une étude de la psyché (autrefois chez Seligman), une autre encore pour le rideau (Louvre, RF11696)
On a, en effet, pu parler de “deux artistes en symbiose” pour décrire les relations de ce couple de peintres que le suicide tragique de Constance Mayer devait briser en 1821. Nombre de compositions furent élaborées en commun, Prud’hon donnant des dessins ou, comme dans le cas de notre toile, des esquisses pour des œuvres que sa compagne exécutait en grand, signait et exposait sous son nom au Salon (par exemple pour Le mépris des richesses, Le flambeau de Vénus ou Le rêve du bonheur). De son côté, Constance Mayer, sa “tendre et judicieuse amie”, aidait son maître dans sa carrière, lui obtenant la commande des différents portraits de Talleyrand. Elle lui dispensait aussi des conseils souvent judicieux, comme pour la composition de La justice et la vengeance divine, qu’elle conduisit Prud’hon à modifier.
Le geste spontané et naturel du modèle ainsi que l’ambiance intimiste qui se dégage de la scène font de notre tableau un merveilleux instantané de l’art de vivre au début du XIXe siècle. La psyché, grand miroir en pied qui vient alors d’apparaître, est d’un dessin très avant-gardiste qui évoque les créations de l’ébéniste Lignereux. Sur la table recouverte d’un drap de velours, une aiguière en argent et un coffret en porcelaine montée complètent l’agencement raffiné de cette garde-robe.
Monsieur Sylvain Laveissière a confirmé l’attribution après avoir examiné le tableau.